La gauche fonce dans le mur en chantant des cantiques 3/
« Je subis la crise de plein fouet, autodidacte, mère seule pendant 22 ans, pas de contrats autres que précaires, petits salaires, et une vision de moi-même altérée par tout ce que j’écoute ou entends. Tous ces gens nantis qui nous gouvernent ne comprennent pas le début de la moitié d’une heure de ma vie. Ramer. Alors c’est vrai que nous sommes fatigués, nous les pauvres, de lire que ça ira mieux, qu’il faut faire comme ci ou comme ça pour que ça aille mieux, que c’est la faute d’unetelle ou d’untel parce que ça ne va pas !
« Entre ceux qui ne bouffent pas, ceux qui n’ont pas de logements, ceux qui n’ont pas d’avenir, ceux qui n’ont pas de papiers, ceux qui n’ont pas d’aide, ceux qu’on expulse manu militari, ça fait du monde et ceux-là personne ne les voit, personne ne les écoute parce qu’ils ne font pas de bruit, parce qu’ils ont peur et que l’énergie est partie ailleurs [environ cinq ou six millions de gens]. Et là pour ces gens-là de quelle politique devons-nous parler ? En urgence comme ça ? Pour que ces gens soient mieux, qu’ils ne se pendent pas à Pôle Emploi ? Qu’ils ne vivent pas sans chauffage ? (c’est presque mon cas). Qu’ils aient des aides sans que les travailleurs sociaux ne les prennent pour de grands enfants ? Avec gronderies gentilles... Que les écoles ne rejettent pas leurs enfants aux cantines ? Bref alors quelle politique ?
« La fin du mois le 12 et les pâtes jusqu’à cette fin, ce qui est terrible c’est de se dire : ça ne change pas, les gens ne comprennent pas tant qu’ils n’ont pas « goûté » à la pauvreté, avec dettes, menaces, etc. Le vertige de tout perdre y compris sa lucidité… Ils ne comprendront pas. Ils ne seront jamais de gauche au gouvernement. »
C'est notre camarade Cécile qui signe ces lignes.
Quand on écoute le petit peuple qui dérouille, quand on baigne dans un milieu où la vie est difficile, quand on croise tous les jours des personnes comme Cécile, on est pas trop enclin à ânonner les slogans qui ne passent pas. On renâcle à faire ceci ou cela, à la demande du parti X, dont on sait très bien que ça fera un flop dans la classe populaire. On râle même devant des discours politiques certes intelligents mais à des années-lumière des préoccupations quotidiennes.
Et le militant de base se demande souvent comment il faut s'y prendre pour faire entendre les voix d'en bas. Se demande souvent pourquoi il faut dépenser autant d'énergie pour faire avancer auprès des instances du FdG ce qui est, pour nous, une évidence basique. On voit dans ces instances des gens qui ont une intelligence parfois fulgurante mais aussi des angles morts, des zones qu'ils ne regardent jamais, une sorte d'incapacité intellectuelle à se mettre à la place de ceux qui rament. Et ils ne parviennent même pas à comprendre que leur modèle politique ne fonctionnera jamais auprès des pauvres.
On voudrait comprendre pourquoi ça bloque. Pourquoi la gauche reste arc-boutée sur des modèles qui ont échoué à répétition depuis trente ans. Alors on réfléchit. On dissèque le passé, les idées, les structures. On se penche aussi sur la composition sociologique « naturelle » des partis de gauche. Très fortement marquée par les professions du tertiaire et le personnel enseignant. Vire tous ces gens de ton parti et tu vas te sentir bien esseulée… Et ces gens peinent à écouter ceux qui ne sont pas de leur classe sociale, qui n'utilisent pas leurs modèles d'analyse, qui se réfèrent ni à la culture des partis traditionnels ni à la culture bourgeoise. Pour accentuer la chose, les pauvres n'ont pas toujours l'aisance intellectuelle pour se faire entendre. Sans compter que la gauche institutionnelle n'écoute guère ses déviants libertaires, autogestionnaires, utopistes, défricheurs de chemins, autodidactes. Et a même tendance à taper sans trop de ménagement sur eux dès qu'ils ont un peu d'audience… Voir aujourd'hui Michéa ou Tevenian, hier Gorz ou Illich, avant-hier Lafargue.
La gauche institutionnelle voit bien — élections et désaffectation… — qu'elle peine à être écoutée des classes populaires. Mais elle peine à écouter le petit peuple. Comment parvenir à se faire entendre ? La question vaut pour les deux parties.
Une solution pour faire avancer la culture populaire dans les partis de gauche — afin de faire avancer les partis de gauche dans les classes populaires — serait de trouver les bons médiateurs. Avec ou sans cravate… Après tout l'écologie a ainsi réussi à se faire une place au sein du Parti de Gauche. On peut rêver que des chiens galeux réussissent à y faire entendre comment prendre en compte le petit peuple qui dérouille. Ça suppose des remises en cause encore bien plus radicales que pour l'intégration de l'écologie.
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Photo Des pas perdus. « Malheur à ceux qui envoient à la guerre / Des pauvres gens contre des pauvres gens ! » Le soldat d'Algérie, Kan Tri, trois voix, trois guitares et trois violons (Patrick Ewen, Gérard Delahaye, Melaine Favennec).
(j'ai posé mon comm, ou j'ai loupé?
RépondreSupprimer(allé, un doublon :
Bon, il serait bien, effectivement que la gauche se reveille un peu, et se mette a la question du revenu de base (un revenu digne pour tous sans conditions (parce que en attendant, comme tu dis, les pauvres prennent super cher)
(je colle des liens (pour vous renseigner, et signer (y'a une initiative europeenne en cours, pour faire avancer un peu l'idée))
http://revenudebase.info/comprendre-le-revenu-de-base/
https://ec.europa.eu/citizens-initiative/REQ-ECI-2012-000028/public/index.do
Bisous :)
La question du revenu de base commence doucement à entrer dans les têtes de la gauche institutionnelle. C'est une idée qui a bien progressé chez certaines personnes. Il va falloir maintenant convaincre les les appareils et c'est plus difficile...
SupprimerEt une fois étendu à une société entière, ça marche toujours? (ie, les effets sont toujours bénéfiques?)
Supprimer1) Votre question me rappelle cette remarque d'un jeune colon latino-américain : la liberté, ça marche chez vous, en Europe, mais chez nous, c'est pas possible. Les indiens, ils ne veulent pas travailler et on est bien obligé de les forcer…
Supprimer2) Être humain nécessite de manger à sa faim. C'est un besoin de base. Si on assure une nourriture suffisante à TOUS les humains de la planète, est-ce que les effets seront toujours bénéfiques ?
3) Au XIXe lors des discussions sur l'obligation de l'instruction, certains députés acceptaient l'élargissement de l'instruction publique à une population plus nombreuse mais refusaient qu'elle soit destinée à tous en disant que non seulement ce serait inutile mais de plus ce serait préjudiciable à la production agricole. D'où le compromis des vacances destinées aux foins et moissons que nous avons toujours...
Bonjour
RépondreSupprimer@partageux
j'ai lu avec un grand intérêt ton discours , et tu dis un moment que l’écologie a provoqué un profond changement au sein de la gauche. Mais justement la confusion, liée à l’écologie n'est elle pas la le problème ? Parler d’écologie le capital, sait le faire aussi.
Un exemple personnel: il y a peu j'ai été à une réunion avec mon patron qui a commencé tout de suite à nous faire une grande discours sur les affiches en trop grande quantité qu'on recevait , que c’était un gaspillage éhonté, qu'il fallait du coup installer des beaux écrans numériques à l'entrée de notre entreprise afin d'informer notre clientèle et que bien sur çà lui couterait moins cher en affiches et forcement en masse salariale.
En parallèle la gauche , le pg en particulier se déclare anti productiviste, ce qui a l'origine est une valeur contraire a la gauche puisque le PS et le PC eux étaient des partis productivistes et qu'ils ont désormais aussi des courants décroissants voir ecosocialistes
De fait le grand problème de la gauche n'est il pas justement d'avoir rajouter une confusion avec ce terme d'anti productivisme car si l'on prend le terme productivisme voir productivité, la signification du terme à l'origine, au sens etymologique est l'art de conduire une production, ce qui en soit ne peut servir a définir le capital comme productiviste mais plus comme système recherchant le profit quitte a détruire y compris sa production pour rapporter plus.(exemple le lait jeté autrefois dans les caniveaux au nom des directives européennes alors que dans le même temps ce produit manquait dans de nombreux pays, cuba par exemple :-))
De cette ambiguïté la gauche n'apparait t'elle pas lorsqu'elle se définit comme anti productiviste comme une gauche archaïque 'et anti progrès et ce d'autant plus que le capital lui a su très vite su s'adapter au discours écolo en créant le capitalisme vert.
on pourrait aussi dire la même chose pour le thème antiliberal? qu'entends cette gauche radicale quand elle le dit?
est ce au sens politique ou au sens économique ce qui n'est pas du tout la même chose? et dans ce cas qu'en il de la lisibilité de ce message idéologique confus que véhicule la gauche.
En tout cas pour moi ce qui en ressort c'est qu'on insiste plus assez sur le rapport d'exploitation entre salariés et patrons plus que jamais présents vu que toute personne qui veut survivre est obligé de vendre sa force de travail au rabais l'exemple d'adrexo en est la preuve évidente.
Je reviendrai prochainement sur les liens entre écologie et monde du travail que je ne puis opposer. C'est très loin des seules économies d'affiches ou du bon tri pour la corbeille à papier chers à ton patron… ;o) Et on causera aussi du productivisme.
SupprimerL'écologie n'est pas, ou pas seulement, une gentille lubie de cadre bon chic bon genre qui cherche à occuper ses soirées ou à se donner bonne conscience. Exactement comme la situation sociale n'est pas, ou pas seulement, une préoccupation de dames patronnesses donnant trois sous aux bons pauvres. Si tu dis à Cécile qu'elle doit s'adresser au Secours catho au lieu de nous faire chier avec des questions qui ne concernent pas la gauche, tu vas l'entendre hurler… ;o)
Le jour ou tu verras un " créve-la-faim " siégeant à l'assemblée nationale , les poules auront des dents ! .. Je serais curieux de voir la composition sociale des partis de gauche ! des "Cécile " , çà doit pas être légion ! On ne peut pas faire les poubelles et aller aux réunions de cellule ou de section , en même temps , ou on discute plus de l'organisation de la prochaine manif , ou la stratégie à adopter , pour les municipales ! Cécile , elle passe loin derriére , y'a les restos du coeur pour elle, sinon , que de lui répondre, en attendant des jours meilleurs , que la solution à ses problémes est dans le programme, qu'on y a pensé ! Avec çà , elle est servie ! il ne lui reste plus qu'à mettre des feuilles de programme dans son assiette , et les bouffer !
RépondreSupprimerEffectivement pour ma part je ne crois pas qu il faut dire. A cecile d aller au secours catho voir meme popu ayant ete employe precaire je ne l lencouragerai meme pas a le faire car je crois que ces assos pour la plus grande partie servent a garantir la paix sociale en gros un bon moyen d empecher les revoltes je lui dirai plutot de se battre avec nous mais pour un revenu universel pour tous et toutes .quand au capitalisme je crois qu il n est pas productiviste ne serait ce que par l ethymologie des mots et le sens premier quand au terme d anti productiviste je le trouve pour ma part encore moins definissable c est un peu comme antiberal des termes qui ne veulent rien dire. Et ne parlerons pas plus au gars qui risque de perdre son emploi que la fameuse cecile dont tu parles.
RépondreSupprimerBref a gauche pour resumer je dirais que la gauche aime bien employer des termes qui font fuir plus qu ils n attirent.
Une chose aussi me choque a gauche aucun moment on ne pose la question de l expropriation du capital on est tjs dans cette espec de posture ou l on te dit en gros apprenez a vivre avec moins car tu pollues la planete en achetant ton jambon condtionne a la superette du coin.
RépondreSupprimer@ partageux
RépondreSupprimerautre commentaire aussi même si je mets la un peu mes idées en vrac et que j'ai quelque peu de mal a te les formuler , tu me parles d'associations caritatives mais sais tu aussi que ces dernières on des critères bien précis pour aider les pauvres? en effet aujourd'hui un certain nombre de personnes ne peuvent même pas en bénéficier car ils sont comptés comme pas assez pauvres aux yeux des assistantes sociales de quartier, car il faut bien sur des bon pour se rendre dans ces fameuses associations ...on croit rêver non? et c'est ainsi que ce genre d'assos jouent souvent les appendices de l’état pour un peu plus humilier une population qui n'en a pas besoin.
je me rappelle il y a peu d'avoir croiser une enseignante qui proposait tout simplement de donner des cours gratuits et voulait mettre une structure cooperative en place et c'est curieux aucun militant même enseignant n'a proposé de relever ce défi alors que des enseignants au front de gauche on en trouve des légions.
1) Tu ne m'apprends rien sur les usages des assos caritatives et des assistantes sociales. C'est pour cela que je suis un farouche partisan de la gratuité inconditionnelle.
Supprimer2) Enseignants. Tu soulèves une question qui gratte. On y reviendra. J'aime bien gratter moi aussi…
bien si tu aimes gratter mais après avoir gratter il faudra se demander comme sortir de cette gauche qui va droit dans le mur en chantant des cantiques.Ayant essayé les collectifs bové les différents partis qui forment l’échiquier politique à la gauche de la gauche j'ai trouvé souvent plein de gens de bonne volonté mais au final on se retrouvait toujours avec un dirigeant ou des responsables politiques qui pousser encore un peu plus au désespoir plutot qu'a mettre en place de véritables solutions de luttes. les raisons des échecs de la gauche sont importants à définir car aucun parti ne se la pose actuellement, mais il faudrait aussi proposer des solutions et essayer entre personnes de bonne volonté de les mettre en place.
RépondreSupprimerDes pas perdus écrivait ici voici peu qu'il n'avait pas la formule magique. Je ne l'ai pas non plus. Mais je suis convaincu que si nous nous concentrons sur ce qui est important pour les gens pauvres ou modestes, nous serons bien plus écoutés. On y viendra.
Supprimerje pense qu'il faut aussi constater que plus çà va plus les réunions de partis à la gauche de la gauche font figure d’assemblée d'anciens .IL y a quand même un gros soucis du coté d'une jeunesse qui elle visiblement est très peu impliquée dans ces partis.Pour ma part avec mon travail je suis très couramment en contact avec des jeunes travailleurs precaires,qui presque tous se plaignent de l'entreprise et constatent la rapacité de la direction; mais pour autant ils sont aussi plusieurs à ne pas vouloir se battre voir à sombrer dans la résignation ou l'illusion que demain çà ira mieux , et que la crise va bien finir par s’arrêter ..certains tentent des formations de compléter avec d'autres petits boulots mais au final il y a fort a parier que la précarité risque encore de durer longtemps vu la situation actuelle, quel élément déclencheur pourrait faire naitre un début de prise de conscience je m'interroge toujours et j'aimerais bien le trouver pour contribuer a le mettre en place à mon modeste niveau.
RépondreSupprimerbonjour
RépondreSupprimercomme je suis syndical dans ma boite et que je sais que visiblement sur ce site il y a pas mal de gens syndiqués et informés..quelqu'un pourrait t'il m'expliquer rapidement la future mutuelle obligatoire d'entreprise qui va être mise en place? mes collègues ont l'air enthousiastes moi beaucoup moins, j'ai l'impression que çà va etre une belle arnaque.auriez vous des liens ou des textes de lois relatifs à ce sujet qui pourrait m'eclaircir et serons nous en droit de la refuser si elle ne nous est pas avantageuse.
j'ai vu de plus que les accord de branche devait démarrer l'année qui vient et j'aimerais bien poser une question a mon employeur sur ce sujet.
a tous et toutes Philippe :-)
et si quelqu'un peut me répondre merci d'avance.
Bien d'accord avec toi. Le PCF avec ses écoles autrefois permettait à ses militants d'acquérir les moyens de "monter", ou tout au moins de s'exprimer en assemblée.
RépondreSupprimerTu fais mes fonds de tiroirs ;-)) pour les images.