Partageux rencontre des personnes cabossées par notre société libérale, change leur identité et ne mentionne ni son nom, ni sa ville pour qu'on ne puisse les reconnaître. « Devant la servitude du travail à la chaîne ou la misère des bidonvilles, sans parler de la torture ou de la violence et des camps de concentration, le "c'est ainsi" que l'on peut prononcer avec Hegel devant les montagnes revêt la valeur d'une complicité criminelle. » (Pierre Bourdieu) La suite ici.

jeudi 22 décembre 2011

Salauds de pauvres


Ils sont 1,6 millions de fauchés qui renoncent à affronter les démarches pour toucher le RSA. Soit par découragement, soit par manque d'information, soit par... choix. 

Le discours sur le «cancer» des assistés va prendre du plomb dans l'aile : Non, les pauvres ne pompent pas les finances de l'État jusqu'à la moelle. C'est le très officiel rapport du Comité national d'évaluation sur le RSA, remis ce 15 décembre à Roselyne Bachelot, qui le démontre. Plus de 1 million de foyers qui vivotent avec quelques heures de boulot et pourraient donc toucher un complément de salaire via le RSA "activité" ne le réclament pas. Un million ! Soit les deux tiers des ayants-droit qui regardent passer les plats.

Idem pour les chômeurs en fin de droit. Ils sont 1,8 millions qui ne bossent pas du tout et pourraient bénéficier d'un RSA complet. Mais plus d'un tiers — 650.000 — ne le demandent pas. Et ils y perdent : pas vraiment gloutons, ces pauvres laissent ainsi filer 249 euros par mois en moyenne. «On est loin du discours selon lequel les gens grappillent un maximum d'aides», ironise Nicole Maestracci, représentante des associations au sein du Comité national d'évaluation.

Bande d'ingrats

Principale raison de ce manque d'entrain : le RSA est une sacrée usine à gaz, pas bien connue et beaucoup plus compliquée que le RMI, qu'il a remplacé en 2009. La moitié des travailleurs précaires ne savent pas qu'ils peuvent cumuler boulot et RSA, révèle le rapport. L'étude est carrée : 3.500 personnes ont été interrogées individuellement. Et les résultats sont plutôt décoiffants.

Parmi les nombreux foyers qui ne réclament rien, beaucoup ne le font pas par ignorance mais par choix. Quatre sur dix préfèrent « se débrouiller autrement ». Et près de 30% d'entre eux y renoncent «par principe», parce qu'ils n'ont «pas envie de dépendre de l'aide sociale ou de devoir quelque chose à l'Etat». Un chiffre pas franchement claironné par nos politiques.

Avec tout ça, l'État fait de jolies économies : 5,3 milliards d'aides non distribuées en 2010 ! «C'est une économie sur le dos des pauvres», râle Martin Hirsch, l'inventeur du dispositif. Il réclame «une vaste campagne d'information», mais l'État n'est pas pressé. Le RSA a coûté 7 milliards l'an dernier. Alors, ajouter 5 milliards en temps de crise...

Les auteurs du rapport, eux, se grattent la tête. Si le RSA est boudé en raison d'«un faible intérêt pour l'allocation» ou «un refus de principe», écrivent-ils, «une meilleure information, pour souhaitable qu'elle soit, ne suffira pas à résoudre le problème». Salauds de pauvres qui refusent d'être aidés !

Formulaires de rien

«On sent chez les gens une lassitude à faire des démarches et à être stigmatisés », note le sociologue Philippe Warin qui a créé l'Odenore, un groupe d'études sur ce phénomène de «non-recours » à l'assistance sociale.

Car le RSA n'est pas la seule prestation dédaignée. Trop compliquées ou mal connues, un tas d'autres aides ne sont pas réclamées. Ce phénomène, ignoré, est tellement fréquent que l'Observatoire national de la pauvreté y consacrera un colloque le 12 mars prochain. Le talent de nos têtes pensantes à monter des labyrinthes administratifs est en effet infini. Et décourageant à souhait. Près de 400.000 personnes qui pourraient avoir droit à une couverture complémentaire gratuite (CMU-C) s'en dispensent. Pour l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé (ACS), c'est encore mieux : 80% de non-réclamations. Idem pour les tarifs sociaux du gaz ou de l'électricité.

Les fauchés ne se pressent pas non plus aux guichets des caisses d'allocations familiales (CAF) : «Pour 1 euro de fraude, il y a 3 euros de rappel de prestations non versées au départ», souligne Philippe Warin. Et ces rappels ne sont qu'une goutte d'eau dans l'océan des prestations à jamais perdues. «Du coup, on a du mal à sensibiliser les collectivités ou l'administration sur le sujet. Ils nous disent : "Ouh la la ! ça va faire mal au budget !"» Mieux vaut continuer de noyer les allocataires sous des montagnes de formulaires.

Depuis 2009, les CAF passent au peigne fin 10.500 dossiers par an pour détecter les fraudes. «On pourrait en profiter pour repérer les allocations non réclamées, explique notre sociologue. Mais la Caisse nationale a refusé.» La chasse aux fraudeurs, c'est beaucoup plus porteur.

Isabelle Barré

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Volé, sans honte, cet article paru dans Le Canard Enchaîné et repris par le site Actuchômage qui mérite la visite.

On écoutera sur ce thème la mémorable chanson de Charlélie Couture datant de 1981. La ballade de Serge K raconte l'histoire, bien réelle, d'un chômeur mort de misère dans la solitude de l'usine qu'il squattait. À l'époque la mort de Serge a fait la une des journaux. Des radios, des télévisions y ont consacré des émissions durant des semaines. Politiques, syndicalistes, universitaires, étaient interrogés longuement...

9 commentaires:

  1. coucou :)

    ouaip ouaip.
    il serait tout de même temps que les braves gens du pays réalisent qu'on les prends pour des cons (of ca va, je sais bien qu'ils sont pas rapides rapides)
    toujours est il que clairement, les "aides" pour les pauvres c'est beaucoup un moyen de les faire chier plus qu'autre chose. On le sait bien, surtout si on a deja eu affaire a l'administration. (si si, on le sait bordel, on le sait que trop, le but c'est pas vraiment d'aider, c'est d'éventuellement aider mais avec la stigmatisation qui va bien, histoire de te rappeller que t'es un gros boulet pas bien nélévé qu'a tout raté)

    comme ca pendant ce temps la, occupés qu'ils sont tous a taper sur les gueux, les vrais profiteurs, les vrais cancers sociaux (regardons donc en haut) peuvent s'en donner a coeur joie.
    pffff
    on est pas arrivés pas vrai...
    alala.

    ben joyeux noel

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  2. Ces salauds de pauvres devraient faire comme ces autres salauds (bien réels) : prendre un conseiller fiscal…

    Merci pour ce billet, qui ne fera pas la une de TF nain.

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  3. Que te dire Partageux...C'est tellement plus simple de bénéficier d'une niche fiscale, d'une exonération de charges, etc...que les assistés de ce pays ne sont autres que les riches et ceci dit sans démagogie.

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  4. voilà un bien beau billet que je vais m'empresser de partager !

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  5. "Laurent Wauquiez, Ministre des affaires européennes, avoue l’échec cinglant du RSA. Il veut obliger ses bénéficiaires à cinq heures par semaine de « service social » et limiter les minima sociaux à 75% du Smic. On croyait que le RSA avait remplacé le Rmi pour, justement, éviter ces dérives !

    Toutefois, les Français ne sont pas des assistés ! La crise et la politique actuelle rendent indispensable la protection que l’Etat peut apporter aux plus pauvres.
    Marine LE PEN et le Front National demandent au gouvernement de ne pas tenir un double langage et de commencer à vraiment considérer les huit millions de pauvres de notre pays, les demandeurs d’emploi, les jeunes couples ne pouvant se loger décemment, les femmes seules, en vérité tous ceux qui souffrent dans notre pays du système économique et financier ultra libéral si cher à M. Wauquiez et à tous ses amis."

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  6. Le Secours catholique dit qu'une manière d'aider beaucoup les femmes seules avec enfants c'est d'augmenter le Smic de façon significative puisque beaucoup travaillent à temps partiel subi. Ce n'est pas du tout dans les projets de Marine Le Pen de passer le Smic à 1700 euros.

    La Fondation Abbé Pierre dit qu'un autre moyen d'aider les plus pauvres est de planifier la construction massive de logements sociaux. Ce n'est pas du tout dans le projet de Marine Le Pen de planifier la construction de 200 000 logements sociaux par an.

    "Tous ceux qui souffrent dans notre pays du système [...] ultralibéral". Il faut rappeler que Jean-Marie Le Pen a toujours été partisan du libéralisme effréné, cf ses livres et cf sa rencontre avec Ronald Reagan...

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  7. Ouais, il est bien cet article du Canard, et le très officiel rapport qui l'a permis, on voit que pour ce qui est de l'austérité, l'autogestion ça fonctionne nickel ; quand m^me plus de 5 milliards d'économies par an pour l'entreprise France, et pas un merci... plutôt des tombereaux d'insultes, tout est fait pour culpabiliser, nous rendre coupables et redevables. Bien vu la capitalisme.

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  8. au fait si vous êtes allocataires CAF, lisez ces conseils, et si vous l'êtes pas faites les circuler vers les allocataires de votre entourage, il y a 300 000 intrusions au domicile des agents de la CAF chaque année

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Vas-y pour tes bisous partageux sur le museau !